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LE VOLEUR

Et des tas de bêtises pareilles. Quelle joie on éprouve à se martyriser…

Barzot a écrit. Les Bois-Créault se sont décidés au mariage. Parbleu ! Canonnier, de Mazas où il se trouve, a donné son consentement, et les bans sont publiés.

— Mon pauvre père ! a dit Hélène en pleurant ; croyez-vous que nous pourrons le faire évader ?

— Sans aucun doute ; mais pas maintenant, malheureusement ; il faut attendre qu’il ait quitté la France. Je serai renseigné et vous préviendrai, le moment venu.

Qu’a pu penser Canonnier du mariage de sa fille ? Je donnerais gros pour le savoir. En tous cas, il lui aura, sans s’en douter, constitué une dot. Roger-la-Honte, que j’avais envoyé à Londres afin de déposer les lettres à Chancery Lane, est revenu avec les cinq cents livres que j’ai prié Paternoster de lui remettre. Hélène n’a rien voulu accepter, en dehors de cette somme.

Et même aujourd’hui, au moment où je lui fais mes adieux chez l’Anglaise, elle me remercie de mes offres.

— Non, dit-elle, j’ai assez d’argent. Je m’arrangerai pour vous faire donner de mes nouvelles par Mme  Ida ; et si par hasard j’avais à me plaindre de quelque chose, elle serait informée ; et je compte sur vous. Mais je suis sûre qu’ils se conduiront bien. Ils sont si lâches !

Elle me tend la main, monte dans la voiture qui l’attend et qui part au grand trot. Elle va retrouver Mme  de Bois-Créault qui est venue ce matin la chercher à Bruxelles, et qui l’a priée, par un billet que j’ai reçu il y a une heure, de venir la rejoindre à l’hôtel Mengelle. Elle sera ce soir à Paris… Quel avenir lui prépare la vie, et quelles surprises ?…

Et que me réserve-t-elle, à moi ? Il me semble qu’Hélène m’a apporté quelque chose, et m’a pris quelque chose aussi ; qu’elle a évoqué en moi des sentiments et des souvenirs que j’avais bannis de