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LE VOLEUR

à prendre un siège et en s’asseyant dans un fauteuil, je… vous offrez une ressemblance frappante avec une personne…

— Une personne que vous avez remarquée, hier, dans le train qui vous amenait de Paris ? C’est encore moi. Vous ne vous trompez pas.

— Alors !… dit Barzot en se levant et en faisant un pas vers un timbre…

Je le laisse faire. Je sais très bien qu’il ne sonnera pas. Et il ne sonne pas, en effet. Il se tourne vers moi, l’air furieux, mais anxieux surtout.

— Voulez-vous m’exposer l’objet de votre visite ?

— Certainement. Je suis envoyé vers vous par Mlle Hélène Canonnier.

Barzot ne répond point. Son regard, seul, s’assombrit un peu plus. Je continue, très lentement :

— Mlle Canonnier se trouvait à Bruxelles depuis avant-hier avec son père. Je dois vous dire que j’ai l’honneur, le grand honneur, d’être très lié avec M. Canonnier ; nous nous sommes rendu des services mutuels ; je ne sais point si vous l’avez remarqué, Monsieur, mais la solidarité est utile, j’oserai même dire indispensable, dans certaines professions. Si l’on ne s’entraidait pas… Il y a tant de coquins au monde !…

— Hâtez-vous, dit Barzot dont l’attitude n’a pas changé mais dont je commence à ouïr distinctement, à présent, la respiration saccadée.

— Je connaissais donc M. Canonnier. Mais je n’avais jamais eu le plaisir de voir sa fille. Elle avait vécu, jusqu’à ces jours derniers, chez des gens qui passent pour fort honorables, mais qui sont infâmes, et qui reçoivent d’ignobles drôles, généralement très respectés.

Les poings de Barzot se crispent. Comme c’est amusant !

— Du moins, dis-je avec un geste presque épiscopal, telle est l’impression que ces personnes ont laissée à Mlle Canonnier. La haute situation que vous