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LE VOLEUR

nocence, et par la révolte un peu sauvage de ma pudeur alarmée. Mais le fils aura reconnu ses torts à mon égard, j’aurai pardonné, un mariage formera le dénouement indispensable, et tout le monde sera content.

— Même Barzot, dis-je ; car il sera certain, après cela, que Mme de Bois-Créault ne le fera plus chanter.

— En effet, murmure Hélène ; dorénavant, c’est moi qui me chargerai de ce soin.

— Ah !… Ah !

— Naturellement, puisque j’ai les lettres. Ces lettres, il faudra que vous les mettiez en lieu sûr, pendant le mois que je passerai à l’hôtel de Bois-Créault.

— Vous n’y resterez qu’un mois ?

— Pas plus. Après quoi, nous romprons toutes relations, mon mari et moi. Incompatibilité d’humeur, vous comprenez ? Du reste, sevré comme il le sera, il faudra bien qu’il prenne sa revanche ailleurs ; et je profiterai du premier prétexte. Je serai une épouse déçue, outragée, séparée d’un mari indigne. Mais je ne demanderai point le divorce, car mes principes religieux me l’interdisent. Je resterai Mme de Bois-Créault, honnête et malheureuse femme — et femme intéressante, j’espère. — J’écrirai à Barzot demain matin.

— Non, Hélène, il ne faut pas lui écrire. Il y a des choses qu’on n’écrit pas. Savez-vous s’ils ne pourraient point tirer parti de votre lettre, à leur tour ? Et d’abord, comment la rédigeriez-vous, cette lettre ? Réfléchissez.

— C’est vrai. Alors, comment faire !

— Il faut aller voir Barzot et lui parler.

— Moi ?

— Non, pas vous. Vous devez rester où je vais vous conduire ce soir et ne vous faire voir nulle part jusqu’à ce que l’affaire soit terminée.

— Mais qui peut aller parler à Barzot ?

— Moi, si vous voulez.

— C’est impossible ! s’écrie Hélène. Vous qui l’avez