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LE VOLEUR

— Tu ne trouves pas que c’est curieux ? me demande Margot dans le train qui nous ramène à Paris. Nous n’avons passé que deux nuits ensemble et, chaque fois, on a découvert un vol dans la maison.

— Oui, dis-je, il y a des coïncidences bizarres.

— Pour sûr. Ah ! maintenant, nous pouvons causer ; car nous n’avons pas eu le temps de nous dire deux mots, depuis hier soir. Qu’est-ce que tu fais, toi ?… Ah ! oui, tu es ingénieur. Tu es toujours, dans les écluses ?

— Toujours.

— Il en faut donc beaucoup ?

— Il en faut partout.

— Ça doit bien gêner les poissons… Ah ! à propos, tu ne sais pas la vérité sur le vol d’hier ? C’est la femme de chambre qui m’a raconté ça ce matin… Figure-toi que les aubergistes avaient chez eux la mère de la femme, une vieille qui était morte dans l’après-midi. — Le cadavre était dans la maison. Quelle horreur ! — Toutes les valeurs de la vieille étaient dans le secrétaire ; et, comme il y a beaucoup de parents, les hôteliers ont simulé un vol pour n’avoir pas à partager l’héritage. Il est bien facile de voir que c’est là la vérité ; toute la ville la connaît à l’heure qu’il est, et tu penses si l’on doit rire à Malenvers. Le coup était mal monté, à mon avis ; car enfin, le mari et la femme qui s’absentent ensemble, l’hôtel complètement abandonné, est-ce que ça peut sembler naturel ?

— Pas un instant.

— Quelles canailles ! La famille va leur faire un procès. Et dire que la politique vous force à frayer avec des gens pareils !…

Et Margot pousse un gros soupir.