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LE VOLEUR

— Je me demande ce qu’elle veut dire, s’écrie Roger en descendant l’escalier. Mais nous le saurons bientôt. Broussaille est à deux pas d’ici, à l’hôtel Pathis ; j’en suis certain ; Ida ne descend jamais autre part.

— Ida, c’est la dame de Paris ?

— Oui ; une sage-femme très chic ; elle vient assez souvent ici ; elle a toute une clientèle de ladies ; tu comprends, c’est ici comme en France…

— Oui, on ne parvient pas toujours à interner Cupidon dans un cul-de-sac, et alors…

— Alors, on envoie un télégramme à Ida qui a toujours son aiguille, landerirette, au bout du doigt, comme Mimi Pinson. Du reste, elle peut rester fille, toujours comme Mimi Pinson, car c’est une bonne fille.

Nous attendons une minute à peine au bureau de l’hôtel ; une servante, qui a été nous annoncer, revient nous chercher en courant. Nous montons au second étage et nous sommes introduits dans un petit salon où, devant une table couverte encore des reliefs du dîner, deux femmes sont assises qui se lèvent à notre approche. La plus jeune saute au cou de Roger-la-Honte qui l’embrasse avec effusion. Dès qu’il parvient à se dégager, il va serrer la main que lui tend la dame brune, à laquelle il me présente. Elle m’accueille fort aimablement, se déclare ravie et sonne pour demander du champagne.

— Quelle mauvaise idée vous avez eue de ne pas venir vous faire inviter à dîner, dit-elle ; nous nous sommes ennuyées à mourir, toutes seules.

— Il aurait fallu deviner ta présence à Londres, répond Roger ; et d’ailleurs, mon ami Randal n’aurait pas osé.

— Vraiment ! s’écrie Ida ; êtes-vous timide à ce point-là, Monsieur ?

— Beaucoup plus encore, dis-je ; ainsi, je n’aurai jamais l’audace de vous dire combien vous êtes charmante.