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qui doit subvenir à toutes les charges que nécessite la vie des hommes qu’elle porte. Elle ne peut pas être fragmentée, partagée à jamais entre les favorisés du sort au détriment des malheureux ; elle ne peut pas être divisée en parcelles plus ou moins étendues qui sont, chacune, propriété individuelle. Elle ne peut point cesser, quels que soient ceux qui en ont la possession temporaire — individus ou communes —, d’être la propriété de tous les Français. C’est leur domaine inaliénable, intangible. Je ne dis point : cela ne serait pas juste, cela ne devrait pas être. Je ne crois ni à la Justice, ni au Droit. Je dis : cela ne se peut pas. Que cela existe actuellement, c’est pour moi une chose monstrueuse, insensée, à laquelle je crois à peine. La propriété individuelle du sol n’est pas seulement un vol ; c’est de la folie. C’est une preuve d’aberration chez ceux qui en sont exclus, et de démence plus grande encore chez ceux qui détiennent la terre.

Non seulement la propriété individuelle du sol condamne les multitudes à la plus effroyable misère morale et physique, tandis qu’elle fait de l’existence des riches quelque chose de misérable et d’indigne ; non seulement elle rend absolument impossible l’établissement d’une taxation équitable, c’est-à-dire intelligente, et utile — car le seul impôt logique, ou plutôt possible, ne peut peser que sur la terre — ; mais elle livre le pays tout entier aux entreprises de qui veut l’attaquer. Il est inutile de savoir beaucoup d’histoire pour se rendre compte de la façon de plus en plus piètre dont la France, depuis cent vingt ans, s’est défendue lorsqu’elle a été envahie. Il ne faudrait pas citer, une fois de plus, les Volontaires de la légende ; outre que les causes qui déterminèrent leur enthousiasme n’existent plus aujourd’hui, et que les illusions généreuses d’alors ont fait place aux décourageantes certitudes d’à présent, on ne doit pas oublier que ces Volontaires furent intéressés, matériellement, à la défense du territoire. Qu’ils furent volés ; que les Propriétés Nationales passèrent dans d’autres mains que les leurs ; qu’on leur permit, quand ils revinrent de la guerre, de crever de