temps à autre, des explosions de colère sauvage, provoquées en partie par le souvenir fanfaron et faussé de rages anciennes, viennent interrompre de leur violence douloureuse ce misérable état d’esprit. Mais, comme ces accès d’énergie n’ont été ni raisonnés, ni même voulus, leur résultat est piètre, voire désastreux. Tels ont été les mouvements insurrectionnels de 1830, de février 1848, de juin 1848, de 1871. La menteuse légende de 1789 et de 1793 hantait l’esprit des insurgés ; le spectre de la Grande Révolution, agitant devant leurs yeux son bonnet rouge taillé dans une robe d’enfant de chœur, les empêchait de distinguer leur route. Les révoltés, hallucinés par les mythes du passé, affolés par les mirages de l’avenir, ne surent ni voir, ni comprendre le Présent. Ils furent défaits et leur défaite leur coûta cher.
Il y a une autre patience, qui n’a nul rapport avec la torpeur. Elle est voulue, calculée, clairvoyante et aux aguets. Elle attend, avec ténacité, et sans se laisser distraire de sa veillée des armes, le moment où pourra se faire jour l’invincible énergie qu’elle recouvre. C’est de cette patience-là que les Pauvres doivent faire preuve, en attendant — la fin.
Je crois que le temps est arrivé, pour les Pauvres, de s’apercevoir que l’état social actuel ne peut pas être le résultat normal de la Révolution Française qu’ils imaginent ; et que cette révolution, par conséquence ne peut point avoir été ce qu’on l’a trompettée jusqu’ici. Ils doivent croire, comme Clemenceau, qui s’y connaît, que la Révolution Française est un bloc ; ils doivent croire, de plus, que cette Révolution est un bloc d’infamies ; ils doivent la rejeter — en bloc.
Ils doivent laisser le soin de chanter les louanges de la Révolution Française, aux bourgeois, aux prêtres, et même à ce prétendant syphilitique qui descend du roi-citoyen par la cuisse d’un geôlier lombard et qui aspire à devenir le roi-républicain. Que ces gens, qui sont virtuellement des cadavres, rendent aux cadavres qui les ont fait vivre tous les hommages de leur choix ; et qu’ils fassent durer les