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dans les Champs-Élysées — deux et demie entre chaque urinoir, environ, — et de faire ainsi, de cette large artère, une Voie Triomphale. L’idée n’était pas banale, assurément. Pourtant, elle n’eut aucun succès en dépit de l’appui que lui apportèrent, m’a-t-on dit, les garde-chiourmes de Nouméa dont M. Humbert reçut autrefois tant de coups de matraque, et qui sont aujourd’hui ses meilleurs amis. C’eût été une bonne chose, pourtant, que de changer l’aspect, et peut-être le nom, de cette grande avenue. Les souvenirs qu’elle évoque, en effet, ne sont pas des plus flatteurs. Les chevaux des Anglais et des Cosaques ont mordu l’écorce de ses arbres, et les Prussiens y campèrent ; c’est, en un mot, le bivouac des vainqueurs. Il eût été sans doute plus facile d’en modifier le caractère et la destination en y plaçant quelques statues qu’en allant livrer quelques batailles au-delà des Vosges. M. Humbert, tenu au courant de bien des choses par ses amis de l’État-Major, n’agissait pas à la légère.

Je ne parlerai point des autres projets, excepté d’un seul : le mien. J’eus mon projet de clou, moi aussi. Ma modestie bien connue m’empêcha de le communiquer à qui de droit et, de ce fait, il n’a peut-être pas grande valeur. Mais, enfin, le voici : je proposais qu’on élevât, dans l’enceinte de l’Exposition, aux frais des victimes du Tonkin et de Madagascar — ou plutôt à leur bénéfice ; mais c’est la même chose — un grand Théâtre Nationaliste. On y eût représenté la Prise de Berlin, et le public aurait assisté à l’entrée, dans le Tiergarten, du brave général Mercier porteur de toute sa passementerie, et monté sur le dos vert d’Esterhazy, cheval marin.

Il fallait pourtant un clou pour cette Exposition. La revue du 14 juillet, bien qu’elle soit pleine d’attraits pour les patriotes, n’est pas ce qu’on peut appeler un clou ; la France y accroche ses espoirs, tous les ans ; mais, malgré tout, c’est comme un clou qui n’a pas de pointe. On ne pouvait songer à une nouvelle distribution de drapeaux, pour corser la cérémonie. La majorité des régiments français en possède déjà deux : l’un, qu’on sort de son étui