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serments, de leurs promesses, de leurs imprécations, du tintamarre que font tous les préjugés rouillés et tous les truismes au vert-de-gris qu’ils traînent derrière eux, tels des chiens ahuris escortés de marmites hors d’usage dont on prolongea leurs queues ; voici la poêle à faire revenir la foi et le besoin de croire, voici le bocal aux traditions, voilà la casserole à faire sauter les grands principes. Cochonnerie d’ustensiles, qui ont fait une sale cuisine, dont on ne veut plus. Vous n’en voulez plus, mais ça ne fait rien : vous en aurez encore, car c’est tout ce que les deux partis ont à vous offrir. Vous serez non seulement leurs dupes, mais leurs dupes volontaires, et vous avalerez leur ratatouille en vous léchant les babines ; vous direz, et même vous penserez, que leur ratatouille est excellente. Vous serez parvenus, vous et les deux partis qui divisent votre pays, à vous tromper vous-mêmes, complètement, et avec la plus mauvaise bonne foi. « L’hypocrisie de l’illusion qu’on se fait à soi-même, dit Feuerbach, est le vice capital de notre temps. » C’est le vice général de la France, à l’heure qu’il est. Il s’agit de ne pas agir, vous comprenez. Voilà une grande misère.

Il faudrait pourtant se décider à voir les choses telles qu’elles sont. Ce n’est pas parce qu’on s’assoit dans une sébile, et qu’on joue au cul-de-jatte, qu’on empêche les événements de marcher. Il faudrait se rendre compte de ceci : que la France a passé par toutes les périodes de préparation, par toutes les phases de développement qui précèdent, si je puis m’exprimer ainsi, l’épanouissement complet d’une nation ; je veux dire : l’épanouissement d’une nation en nation, ou sa mort.

Ces périodes de développement ne sont pas les mêmes pour tous les pays ; elles ne se correspondent, d’une contrée à l’autre, qu’à de longs intervalles et n’arrivent à s’équivaloir que lorsque l’œuvre de préparation, dont elles ont marqué les étapes, est terminée. Elles sont plus ou moins prestigieuses, plus ou moins espacées, plus ou moins facilement compréhensibles ou dénaturées par la légende. Mais ceci est à remarquer : plus leur origine est natu-