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tait, c’est encore politiquement que devraient agir les pauvres. À la première occasion, c’est-à-dire à la première défaite, ils devraient mettre la main sur la partie la plus vulnérable du machinisme de l’État, c’est-à-dire sur l’armée. C’est seulement l’emploi judicieux de la force, au moment propice, qui peut mettre un terme à la division de l’humanité en riches et en pauvres, en êtres qui ont tout et en êtres qui n’ont rien — et qui peut donner à tous les hommes l’assise nécessaire au bonheur qu’ils auront à développer en beauté et en intelligence : une Patrie.

Ce que je dis ici, beaucoup de gens l’ont pensé, le pensent. On a parlé aux pauvres d’économie sociale, de salaires, d’or, de moyens de production ; je crois qu’il vaut mieux leur parler de la nature, de la terre qui non seulement produit des grains et des fruits, mais des fleurs. On a eu tort de ne pas faire apparaître aux pauvres, au lieu de statistiques ridicules et de chiffres qui ne disent rien, l’âme de la nature ; on a eu tort de ne pas la leur faire sentir, contempler en eux-mêmes. La nature leur aurait donné ce qu’ils ne peuvent acquérir nulle part — et l’idée révolutionnaire ne serait pas écrasée entre les sales pages des bouquins pédantesques. On a parlé aux pauvres de la Vérité comme d’une force intangible et toute-puissante, existant par elle-même et à jamais. Il n’y a pas de forces, mais seulement des transformations de la matière. Il arrive que ces transformations se condensent en des vérités qui durent un temps, et forment des levains qui font fermenter les esprits ; et ces esprits, qui sont eux-mêmes des transformations de la matière, n’ont besoin, pour travailler et produire, ni de règles ni de formules, et ne réclament que la satisfaction des appétits physiques, que peut seule assurer aux hommes l’égalité dans la possession de la terre.

Je répète ici ce qu’on a dit avant moi ; ce qu’on va dire, répéter et crier après moi. Ce livre est comme une cloche qui commence à tinter, qui sonne, qui sonnera bientôt à toute volée. Que sonne cette cloche ? Elle sonne le glas. Que sonne-t-elle ? Elle sonne le tocsin. Elle sonne le glas