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Ils sauront aussi que la prostitution est réglementée en France, et s’étonneront de cette hypocrisie. Mais il y a une autre industrie, bien française et nationaliste, qui doit vivre : la police. La femme, même dans l’exercice des fonctions les plus utiles à la grandeur et au bon renom du pays, est sacrifiée au mouchard. Le mouchard peut arrêter la femme et l’emprisonner à son gré. Tout est permis au mouchard, parce qu’il travaille pour l’armée ; et il envoie à Saint-Lazare des femmes qui devront aussi travailler pour l’armée, et lui confectionner les chemises que lui livreront des entrepreneurs nationalistes. Arrestations et emprisonnements sont arbitraires, illégaux. Le code est bafoué par des ordonnances administratives. La loi est souffletée par le mouchard. La France, qui se vante d’avoir proclamé les Droits de l’Homme, n’a pas encore trouvé une femme comme Madame Joséphine Butler, pour réclamer les Droits de la Femme. Il est douteux qu’elle trouve jamais cette femme-là. Du sang français coule dans les veines de Madame Butler. C’est du sang catholique seulement qui coule dans les veines des femmes françaises.

Les étrangers se font souvent de pauvres idées de l’immoralité française. Ils croient qu’elle a des limites. Elle n’en a pas. De cette immoralité, la misère n’est pas toujours la cause. Elle est produite aussi par la platitude, l’hypocrisie et l’artificialité sur lesquelles se fonde la vie française d’aujourd’hui. Le mépris de la femme pour l’homme trouve cette forme d’expression : se vendre à lui. Quand l’homme a cessé, de par son ignominie de vaincu fanfaron, d’être un objet d’enthousiasme, d’affection ou même d’excitation sensuelle, on peut tout de même en tirer de l’argent. C’est la seule chose qu’on en puisse tirer. L’argent, après tout, donne, sinon la liberté elle-même, au moins son illusion ; et l’illusion de la liberté est déjà quelque chose pour un être qui aspire sans cesse à l’indépendance complète et qu’on a condamné à l’esclavage perpétuel. L’argent permet aussi de satisfaire, en leur rognant les ailes, des rêves de beauté qui hantent