Page:Darien - La Belle France.djvu/170

Cette page a été validée par deux contributeurs.

surnaturalisée de l’esclavage moderne. On est catholique pour deux raisons : par imbécillité ou par intérêt ; dans les deux cas, parce qu’on n’est pas libre. Les Françaises catholiques, dont la situation sociale, intellectuelle et morale, est tellement inférieure à celle des femmes des pays protestants, doivent leurs sentiments religieux à l’une des deux causes ci-dessus. Elles ont peur du diable, ou bien elles ont peur de la révolution. Ou bien — j’ai honte de l’écrire en français, mais c’est absolument nécessaire — elles ont faim. Elles se prostituent à Dieu.

On a expliqué fréquemment l’empire que le prêtre exerce sur la femme. On a généralement donné pour causes à cette influence la vanité, l’ambition et l’ignorance féminines. L’Église, a-t-on dit, a trouvé dans la femme, telle que la lui avait depuis longtemps préparée sa doctrine, l’agent grâce auquel elle pouvait parvenir à se mêler d’une façon intime à la vie des nations ; à enrouler peu à peu le parasitisme de ses lianes autour des rameaux verts et pleins de sève qui s’élançaient du vieux tronc humain. La solitude mentale de la femme fut mise à profit ; ses besoins d’amour, de dévouement et d’enthousiasme furent captés, détournés dans la direction de la religion, et mis au service de l’Église. Le prêtre devint le seul ami intellectuel d’un être qui avait été enfermé, avec ses sentiments et ses aptitudes voués au néant, dans la monotonie d’occupations animales. La brume des rêves et le vague des espoirs féminins se solidifièrent dans la religion et dans le prêtre. Toutes les réserves d’affection de la femme, tout l’amour qu’on n’avait point su recevoir d’elle, se transformèrent en une dévotion ardente ; ses pensées, vagabondant à la recherche du savoir qu’il leur fallait, se reposèrent dans le dogme ; l’incertitude de ses tendances artistiques se satisfit de l’appareil pompeux, de la mise en scène de l’église. Sa vie mentale s’immobilisa au pied du crucifix. Le prêtre devint son conseiller. Seul, il lui témoignait la sympathie dont elle avait soif, devinait ses pensées intimes, s’intéressait à toute son existence. L’église devint nécessaire à la femme. Et comme de cette nécessité dé-