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donnerait définitivement la puissance suprême qu’ils ambitionnent, les chefs militaires conservent à tout prix à cette partie de l’armée nationale qui est l’armée active son caractère prétorien. Au risque de compromettre la défense du pays, au risque — qu’on peut prophétiser, hélas ! — d’épouvantables catastrophes et d’une débâcle peut-être sans lendemain, ils s’obstinent à faire de l’armée, au lieu de l’instrument de libération qu’elle devrait être aux mains d’une démocratie intelligente, l’outil de despotisme qu’elle devient de plus en plus dans celles des officiers.



Absinthe-minded beggars.
d’après R. Kipling.

Les officiers forment, dans la nation, une caste à part ; voilà un truisme, ou presque. L’utilité de cette caste reste à démontrer ; et il serait impossible, de plus en plus impossible, de baser cette démonstration sur des faits. Des phrases sonores et des périodes ronflantes ne prouvent rien ; de bonnes raisons vaudraient mieux. Il serait sans doute difficile de les fournir. Il serait malaisé, par exemple, de montrer quels services, depuis trente ans, son corps d’officiers a rendus à la France ; comment il l’a défendue, et fait respecter ; comment il a fait tout ce qu’il pouvait faire afin de lui conserver le prestige qu’avaient pu lui laisser ses défaites. On pourrait exposer sans peine, au contraire, de quelle façon les officiers ont à maintes reprises, et surtout depuis ces dernières années, fait de la France la risée du monde entier. Depuis 1871, ils mascaradent comme les représentants attitrés, le symbole vivant de la patrie. On a osé écrire qu’ils portent dans leurs fourreaux l’honneur et l’avenir de la France. On a osé écrire ça. J’écris que ce qu’ils ont dans leurs fourreaux, c’est une lame mal trempée, qui fut présentée