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l. d. p.
La débâcle prochaine.


Il est bien entendu que, pour le moment, les armées nationales n’existent que de nom. Théoriquement, il est impossible de séparer l’armée active de ses trois lignes de réserves, qui auraient à combattre avec elle en cas de guerre ; en réalité, l’armée active est une armée prétorienne, plus nombreuse seulement que celles qui l’ont devancée. Ses chefs, ou du moins la plus grande partie d’entre eux, ne l’ont jamais considérée autrement ; appartenant presque tous aux classes privilégiées, à l’aristocratie et à la bourgeoisie, ils ne peuvent naturellement désirer l’existence d’une armée démocratique ; ils forment une caste instinctivement opposée aux aspirations populaires et aux idées républicaines, et font tous leurs efforts pour maintenir leur position. Ils savent que leurs privilèges risquent d’être menacés et mis en péril, soit par l’armée elle-même qui peut se lasser de leur despotisme, soit par la partie civile de la population, qui peut empiéter sur leurs prérogatives ou se mettre en tête de les contrôler. Contre ces deux dangers ils se sont prémunis et fortifiés par la discipline et une organisation spéciale.

Je ne crois pas nécessaire de parler de la discipline en usage dans l’armée française, discipline qui constitue, hélas ! — et l’on n’a pas honte de l’avouer — la force principale de cette armée. Cette discipline est horrible et, qui pis est, imbécile (excepté à un seul point de vue.) Qu’elle soit utile à la cohésion et à l’efficacité de l’armée, comme armée, ne peut pas se soutenir un instant ; le bon sens et l’exemple d’autres nations (la discipline anglaise, dirai-je, celle de la flotte britannique) prouvent aisément le contraire. Cette discipline odieuse et stupide, qui cause chaque année le désespoir, la maladie, la mort morale et physique de milliers de Français, n’a réellement qu’un but : donner une énorme importance au pouvoir de l’oligarchie militaire ; forcer le citoyen à se pénétrer, pendant