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LA
BELLE FRANCE



I


Væ Victis !

C’est une chose laide, un vaincu.

L’être qui porte au front le stigmate de la défaite, quels qu’aient été sa bravoure dans le combat et ses efforts vers la victoire, n’est pas beau à contempler. Il a perdu, au moins momentanément, l’estime de lui-même et la confiance en soi qui sont la marque de l’Individu libre ; s’il put échapper à l’esclavage matériel, la servitude morale pèse sur lui, l’enserre, l’étreint ; et il cesse d’être un homme, oui, pour devenir une chose. Pourtant, lorsque le vaincu a le courage de comprendre qu’il a mérité son sort et de l’accepter, de boire d’un coup l’amertume de la défaite et de renoncer franchement aux représailles ; — ou bien quand, silencieusement, sans forfanterie et sans bravades, il se met à réparer ses forces et forge, des débris de l’épée que le vainqueur a rompue dans ses mains, l’arme qui doit faire sortir de la revanche une existence nouvelle ; lorsqu’il se résout à n’élever le front et la voix que le jour où il pourra lever aussi ses deux poings armés et s’avancer vers l’ennemi triomphant ; alors, le vaincu perd de sa hideur ; une certaine fierté brille dans son