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que c’est en son esprit qu’est la force. Mais il faudrait, pour cela, qu’il pût avoir pleine conscience de sa force, de sa joie et de son esprit ; les armes nécessaires à son salut sont dans ses mains, mais il n’en sait rien ; on l’empêche de le savoir. Ce seront peut-être la saleté morale et la tristesse de ses tyrans qui lui ouvriront les yeux sur leur faiblesse, sur leur définitive pourriture.



Le goût n’est pas seulement une indication de moralité ; c’est la seule moralité.
Ruskin.


En effet, quelle que soit la cécité morale du peuple et quelque attaché qu’il soit à son aveuglement, il viendra bien un moment où il sera obligé de s’apercevoir que ce qu’on lui donne comme gaîté n’est que désolation ; que ce qu’on lui donne comme esprit n’est que misérable sottise ; que ce qu’on lui donne comme force n’est que pitoyable faiblesse. Il s’apercevra alors que les calembours du vaudeville, les flons-flons du café-concert, l’assourdissante chaudronnerie des musiques militaires, le rire gras de la presse à scandales et les hoquets hystériques de la littérature patentée sont les éléments nécessaires de l’épouvantable cacophonie qui doit étouffer ses gémissements, ses plaintes et ses cris de révolte. Il s’apercevra de tout ce qu’il y a de dégradant et d’abject dans son acceptation d’une oppression intellectuelle aussi grossière, dont les motifs sont aussi clairs à deviner et les résultats aussi faciles à constater. Il se rendra compte que c’est en lui, en lui seul, que résident la joie, l’esprit et la force. Et l’exaltation que produira cette découverte lui donnera l’énergie nécessaire au nettoyage définitif de l’intelligence française, depuis si longtemps déshonorée, salie et corrompue par les dégoûtants coquins de la bourgeoisie.

Non seulement ces sacripants sont lugubres, plats, et