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tions, comme on le dit, mais par l’obligation du service militaire, qui en exagère l’horreur ; le droit de jambage, tous les privilèges les plus odieux de l’ancien régime, subsistent, aggravés. La seule chose qui distingue les déshérités d’aujourd’hui de ceux du temps passé, c’est qu’ils ne connaissent pas toujours leurs maîtres. D’ailleurs, qu’ils les connaissent ou non, peu importe : ils les aiment ; ils sont prêts à les défendre jusqu’à la mort. Car en défendant ce qu’ils appellent la patrie, ils ne défendraient que leurs maîtres. Défendez-les donc, et servez-les. Soyez-leur fidèles comme des chiens — et vous serez traités comme des chiens.

Quelque malheureuse que soit la situation des masses prolétariennes en France, ce serait une erreur de croire qu’elles sont anxieuses d’en sortir ; une minorité seulement a soif d’une existence nouvelle. La majorité s’est acagnardée dans sa misère ; je suis sûr que, si on la consultait, elle demanderait comme remède à ses maux l’extension générale du système protectionniste. On reproche à l’Anglais d’être conservateur, à outrance ; il serait plus juste de dire qu’il est très défiant ; mais le Français n’est pas seulement conservateur : il est réactionnaire. Il l’est avec fureur, avec rage. Et c’est de l’excès même de ces sentiments réactionnaires de la foule que sort cette passion de la liberté qui ne fut jamais que l’apanage de quelques-uns, et dont la France sut accaparer le glorieux souvenir afin de s’en faire une auréole dont elle n’est digne à aucun titre.



La joie de l’esprit indique sa force.
Emerson.

Malgré l’effroyable misère qui l’accable, le peuple a su conserver dans son esprit une gaîté qui contraste avec la solennité lugubre et creuse de la bourgeoisie. C’est peut-