la Sibérie. Les peuples ? Le pauvre peuple russe croupit dans son esclavage, dans sa vermine morale et physique, se débat contre l’ignorance, contre la fièvre, contre la faim. Le misérable peuple français croupit sur sa honteuse défaite dont le souvenir lui donne le cauchemar, se débat fébrilement contre les vérités qui veulent lui ouvrir les paupières, et qu’il refuse de voir. Le peuple russe « qui ne connaît, dit Adam Mickiewicz, qu’un seul héroïsme : celui de la servitude », est lié, par l’Autocrate blanc et le Tartufe tricolore, au peuple français qui ne connaît plus qu’un seul héroïsme : celui du mensonge. — Vive la Russie ! crie le peuple français, qui se dit libre, et qui est esclave, et qui n’est plus même un peuple — et qui le sait.
— Vive la Russie ! crie Prudhomme en brandissant son parapluie ou en agitant son sabre (retour d’Allemagne). La Russie, parbleu ! continue-t-il tout bas, ne peut rendre aucun service à la France dans une guerre de revanche. Elle ne pourrait jouer un rôle important dans une lutte avant un mois, deux mois peut-être, à dater du jour de la mobilisation. L’Allemagne, avec deux ou trois corps d’armée empêcherait (s’il en était besoin) toute action rapide de l’armée russe. D’ailleurs, la Russie est incapable de tout. Il lui a fallu un an pour étouffer l’insurrection polonaise, malgré les atrocités commises par Mourawieff le Bourreau. Au Caucase, elle n’est arrivée qu’à des résultats partiels, après des années et des années de guerre. Depuis 1877, depuis Plevna où la clef de la position, la redoute de Grivitza, ne put être emportée que par les Roumains, son armée n’a fait aucun progrès ; au contraire. Elle serait battue, sur mer, par l’Italie ; et sur terre, par le Japon. Mais cette guerre de revanche qu’elle ne peut nous aider à entreprendre, elle peut — justement — l’empêcher. En concluant une alliance avec nous, elle contresigne le traité de Francfort — cet excellent