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les hontes, afin de pouvoir saigner les pauvres et vider leurs bas de laine. Les scandales du Panama ont éclaté, continuent. On perquisitionne, on arrête des gens, on les relâche, on les emprisonne, on rend des ordonnances de non-lieu — mais on ne rend pas l’argent. — Petit-Gris, vertueux républicain, a volé 1.600.000 francs ; M. de Trisonaye, qui représenta si longtemps l’intégrité au ministère de la guerre, n’a volé qu’une centaine de mille francs (télégraphiquement). Tout ce qui est au pouvoir a volé. Il n’y a que des voleurs au pouvoir ; des voleurs qui ont dépouillé leur patrie non seulement de son argent, mais de son intelligence et de son énergie. Devant de telles infamies, le peuple ne se soulève pas. Vingt-quatre ans d’avilissement en ont fait une chose inerte, une éponge à bottes, un crachoir. Il ne comprend plus que, pour qu’il puisse vivre, pour que la France vive, il faut que la canaille dirigeante soit jetée à l’égout. Il ne comprend plus rien, même pas qu’il est devenu la risée du monde entier. Il s’indigne lorsque les bombes de Ravachol ou d’Émile Henry blessent ou tuent quelques-uns de ses exploiteurs, quelques-uns de leurs valets ; il s’indigne lorsque le couteau de Caserio crève le plastron de Carnot. Il a de la pitié pour tout le monde, mais pas pour lui-même.

Alors, pourquoi aurait-on pitié de lui ?….. En avant, fils de pauvres ! Sac au dos ! Allez crever sur le champ de bataille ! Et vous ! les vieux, payez, payez et payez encore, pour que vos fils puissent crever ! En guerre !

Pas du côté des Vosges, la guerre. Non. Pas encore pour cette fois-ci. Nous sommes prêts, bien entendu, mais nous préférons attendre (comme le lapin). Chacun, n’est-ce pas ? est libre de choisir son heure. Et on nous a pris tant de pendules que nous pouvons bien y mettre le temps, à choisir notre heure….. Mais il y a une grande île, tout là-bas, où les Jésuites ne peuvent pas s’installer