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cette industrie judiciaire et extra-judiciaire qui est organisée pour la spoliation générale, — que m’importe ? Mme  Hardouin est une maîtresse aimable ; son mari ne me la dispute pas ; et voilà l’important.

Et puis, n’y a-t-il pas des gens pour prétendre que le voleur a son utilité ? Paradoxe, c’est possible. Mais les crimes que le brigand inconnu vient de perpétrer à Malenvers, la France, fille aînée de l’Église, n’est-elle pas en train de les commettre, multipliés à l’infini, in partibus infidelium ?



Le général Maubart, qui n’était jusqu’ici que le héros de Nourhas, est maintenant le conquérant du Garamaka. La France est plus fière de sa dernière conquête que le triomphateur lui-même ; les journaux qu’elle lit ne lui laissent point ignorer l’énorme valeur de sa nouvelle possession ; et elle semble tout à fait convaincue de cette grande vérité : que son avenir est au Soudan. Quant à mon père, il n’est certainement pas insensible à la douceur des louanges ; il est loin de dédaigner la gloire que lui vaut son succès ; mais il a laissé au second plan les satisfactions d’amour-propre. Ce sont des considérations d’un ordre plus matériel qui provoquent son allégresse.

Je le trouve à Paris, où j’ai été le voir dès son retour, installé dans un luxueux appartement de l’avenue de Villiers. C’est la baronne de Haulka, paraît-il, qui lui a préparé cette délicieuse retraite ; le goût de la baronne est indiscutable, mais ne doit pas laisser d’être coûteux.

— Qu’est-ce que ça fiche ! s’écrie mon père. Est-ce que tu te figures que je reviens les mains vides ? Pour te détromper, mon garçon, je vais t’annoncer une bonne nouvelle. Je n’ai point oublié que je n’ai pas eu l’occa-