pouvoir, justement effrayés des progrès rapides de la dépopulation, ont fait marché avec certaines congrégations qui ont entrepris de prêcher, par toute la France, la bonne parole de la fécondité. Les prédicateurs en robes brunes, blanches ou noires effrayent les femmes volontairement stériles de l’horreur des châtiments éternels ; ils stigmatisent la prudence conjugale ; jettent l’anathème aux ablutions ; déclarent au nom du ciel que l’eau bénite doit suffire à une épouse chrétienne. Les femmes, que terrorise l’idée d’être exclues de la sainte table, au vu de toute la ville, promettent d’obéir aux recommandations du moine, et y obéissent quelquefois.
C’est au cours du sermon d’un capucin repopulateur que j’ai pu entamer avec Mme Hardouin, auprès de laquelle je m’étais placé comme par hasard, une petite conversation d’un tour légèrement immodeste. Et je n’ai pas quitté la dame, que j’avais reconduite chez elle, avant de lui avoir fait, ainsi qu’on disait autrefois, l’aveu de ma flamme. Cette flamme, j’espère que Mme Hardouin consentira, comme on disait encore, à la couronner. En fait, elle m’accorde un rendez-vous ; puis, un second ; puis, un troisième. Et enfin, un soir, elle couronne…
Le lendemain de ce soir-là, le lieutenant Labourgnolle, un bon camarade, me déclare avoir vu sortir de ma maison Mme la notairesse ; comme supplément d’informations, il ajoute qu’il l’a vue entrer, un quart d’heure plus tard, dans la maison qu’habite Courbassol. Est-ce possible ?… Comme psychologue, persuadé qu’il n’y a que le premier pas qui coûte, fût-ce un pas redoublé, je suis assez disposé à admettre la chose ; mais comme amoureux, je me rebiffe…
D’ailleurs, Courbassol serait trop heureux ; il aurait toutes les chances à la fois. Il vient d’être élu député à une forte majorité. Cette élection a produit dans Malenvers une sensation énorme.