avec mon honneur. C’est pas gai. Malgré tout, ça servira sans doute à quelque chose. Je vais te dire. Le gouvernement est sur le point d’entreprendre, à la faveur du tohu-bohu que causera bientôt l’ouverture de l’Exposition, une nouvelle expédition coloniale. Il s’agit de conquérir le Garamaka. Sais-tu où c’est, toi, le Garamaka ?
— Non.
— Moi non plus. D’après ce que j’ai entendu dire, ça doit être au Soudan, quelque part, dans un coin. Enfin, la France en a besoin. Eh ! bien, j’espère la commander, cette expédition. L’administration coloniale est contre moi, c’est vrai ; mais je suis l’homme du véritable pouvoir, du conseil occulte qui dirige en réalité nos entreprises et nos possessions d’outre-mer. Je suis à tu et à toi avec les membres de cette confrérie puissante ; je trinque avec eux ; à la tienne, Étienne ! Ils finiront bien par avoir le dessus, une fois de plus, et à moi le Garamaka ! La marine voudrait avoir le commandement de l’expédition ; elle a, pour chacun de ses régiments d’infanterie et d’artillerie, à peu près deux généraux et cinq ou six colonels qui pensent qu’on ne leur fait pas casser assez de gueules, et qui voudraient bien trouver de l’emploi. Mais je crois que la marine pourra se taper. Bien entendu, si je suis nommé, je te prends comme officier d’ordonnance. Je mènerai l’affaire rondement. Le Garamaka doit nous appartenir. Vois-tu, mon petit, l’avenir de la France est au Soudan.
— On le dirait. Et l’Alsace-Lorraine, naturellement, est oubliée ?
— C’est curieux ! Tu me poses juste la question que me posait hier Raubvogel… À propos, il a été très bas, Raubvogel. Il a éprouvé d’énormes pertes d’argent ; ce n’était pas très clair ; on a parlé de poursuites. Mais tu connais le pèlerin ; il retombe toujours sur ses pattes. Il a obtenu une magnifique concession à l’Exposition. Il se