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me dit qu’il faut me méfier des exagérations et me garder des extrêmes.

— Ne soyez pas trop républicain, dit M. Curmont.

— Ne soyez pas trop religieux, dit l’abbé.



L’Exposition de 1878, qui fut l’une des premières manifestations du relèvement de la France, a été pour moi l’occasion de divertissements nombreux. Je me rappelle parfaitement avoir assisté, le derrière sur l’herbe, à la grande fête de nuit donnée, à Versailles, en l’honneur du Shah de Perse. Je me souviens aussi que c’est le lendemain de cette fête qu’une communication importante me fut faite par un de mes condisciples. Ce jeune homme, neveu du ministre de la guerre, avait appris que le colonel Maubart se trouvait dans une vilaine situation. Il paraît que mon père avait engagé sa femme à offrir l’hospitalité à une jeune parente, âgée de douze ou treize ans, de l’innocence de laquelle il s’est permis d’abuser. L’enfant s’est plainte. Et, bien que les personnes à qui elle s’était adressée l’eussent engagée à se taire, l’affaire a été ébruitée. Généralement, on ne sait pas par qui ; mais mon condisciple le sait. Il a entendu dire à son oncle que le général de Lahaye-Marmenteau, qui avait recueilli les renseignements nécessaires, l’a mis au courant des faits. Le ministre va être forcé d’agir car la presse, sans doute à l’instigation sournoise du général, va commencer une campagne contre le colonel Maubart.

Deux jours après, un dimanche, je vais à Saint-Denis et, carrément, j’informe mon père de ce que je sais. Il s’étonne, nie, balbutie, cherche à s’excuser, parle de ces petites filles qui sont toujours dans vos jambes. Mes révélations au sujet du général de Lahaye-Marmenteau l’émeuvent très fort.