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fourrer dans mes ulcères les doigts blagueurs des incrédules !

Le découragement m’assomme.


Un désir violent me saisit. Une envie atroce me tenaille : je voudrais être Lecreux.

Je ne souffrirais pas comme ça, je ne ressentirais pas le mal lancinant qui me point. Et je m’écrierais gaîment, ce soir, à table, en débouchant une bouteille :

— En voilà une que les chaouchs ne boiront pas !

Ce serait toute ma vengeance, ma foi ! et, après, je ne songerais plus au passé. Je n’aurais même pas la peine d’empêcher les souvenirs d’autrefois de se présenter à mon esprit. Je n’y penserais point, à cet autrefois ― naturellement ― pas plus qu’on ne pense à un médicament amer qu’on a avalé, à une tache de boue qui a sali vos vêtements et qu’un coup de brosse efface…


Ma vengeance !… Est-ce que je veux me venger ?

Oui, si c’est se venger que d’ouvrir devant tous le livre de son existence, de montrer ce qu’on a souffert, de dire ce qu’on a pensé.

Je veux faire cela à présent. Si c’est vengeance, tant pis ; et si c’est justice, tant mieux.


Je crois que ce sera justice, simplement. La haine me gonfle le cœur, c’est vrai. Mais elle est trop forte, je le sens bien, pour pouvoir jamais s’assouvir ― ou se calmer. Elle ne me quittera plus, maintenant ; et c’est elle qui mettra un frein à mes emportements et brisera mes colères. Mais c’est elle aussi qui, calme et froide, me montre déjà le pilori auquel je dois clouer,