à coups de crosse. Les indigènes l’ont trouvée mauvaise ; ils ont pris le parti de déposer une plainte au bureau arabe, à Aïn-Halib. Et, lorsque nous sommes retournés dans les jardins pour faire notre petite provision, nous avons trouvé un vieil Arabe qui nous a fait voir de loin un bout de papier sortant à demi d’un étui de cuir qu’il portait sur la poitrine. Le vieillard nous a fait comprendre que ce papier lui donnait le droit de nous faire mettre en prison, si nous persistions à pénétrer sur ses terrains sans son autorisation.
— Tiens, c’est drôle, me dit le Crocodile. Qu’est-ce que ça peut être que ce papier-là ?
— Je ne sais pas, mais c’est bien facile à voir.
Et je m’approche du vieux, qui recule en faisant de grands gestes. Il déclare qu’il a payé son papier cent sous au bureau arabe et qu’il ne le laissera pas prendre. Je lui explique que je ne tiens pas du tout à le lui prendre, mais que je voudrais bien le voir, même d’un peu loin. L’Arabe se retire à l’écart, sort son papier de l’étui, le déplie soigneusement et me le montre, à trois pas.
J’en reste bleu. C’est une page de la Dame de Montsoreau !
— Et tu as payé ça cent sous ?
L’Arabe me fait un signe affirmatif.
— Douro, douro.
Le Crocodile me frappe sur l’épaule.
— Épatant, hein ? Et dire qu’on fait passer des hommes au conseil de guerre pour avoir perdu une brosse ou volé des pommes de terre.
Un beau jour, on nous remplace dans nos fonctions de bûcherons et de chaufourniers par des indigènes