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cat lorsqu’on a à remuer un sol aussi rocheux et aussi rude à entamer que celui que nous éventrons, terrain pierreux dans lequel la pioche porte à faux et rebondit sur le roc, en envoyant dans les bras des contrecoups douloureux. Il ne manque pas de gens qui n’ont pas autant de chance que moi et qui se donnent un mal du diable sans arriver à des résultats appréciables.


Il y a ainsi dans mon équipe un certain Dubuisson qui pourrait facilement emporter dans ses poches, à la fin de chaque séance, toute la terre qu’il a piochée. Il a commencé par travailler avec acharnement, mais, voyant que son courage ne lui servait à rien, il s’est ralenti peu à peu et se contente maintenant de gratter légèrement le sol avec la pointe de sa pioche. Quand il a abattu de quoi remplir un képi, il prend sa pelle et se met en devoir de débarrasser la fouille.

— Dubuisson ! lui crie l’Homme-Kelb, voulez-vous lancer la terre plus fort que ça ! Elle retombe toute dans la tranchée.

— Sergent, ce n’est pas de ma faute. Il y a un crochet au bout de ma pelle.

— Tâchez de la charger un peu plus, votre pelle ! Et baissez-vous pour ramasser ces pierres !

— Impossible, sergent ; la terre est trop basse. Mettez-la d’abord sur un billard et nous verrons.

— Huit jours de salle de police !… Avec le motif… Impertinence flagrante !

Dubuisson, sans rien dire, continue à tapoter autour d’une grosse pierre. Voilà trois jours qu’il la gratte, cette pierre, tout doucement. On dirait qu’il a peur de lui faire du mal. Il prétend qu’elle est collée.

— Oui, sergent, collée. Ou plutôt, voulez-vous que