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Et il nous conduit auprès d’une large ouverture béante au ras du sol. Le puits n’a jamais été maçonné ; il a été percé à même la terre qui, par place, s’est éboulée, laissant par-ci par-là de grosses pierres qui font saillie le long des parois. Des arbustes, des plantes, ont poussé au hasard, verticalement ou horizontalement, entremêlant leurs branches et leurs feuilles et, formant un fouillis tel, dans le rétrécissement sombre du puits, qu’on n’en peut apercevoir le fond, desséché sans doute, à trente ou quarante mètres peut-être. À quelques pieds seulement de l’ouverture, deux nids de pigeons apparaissent entre les larges feuilles d’un figuier sauvage.

— Entendez-vous les cris des petits ? demande Lucas. Les voyez-vous ? Je vais descendre les chercher et je vous les passerai.

— Veux-tu qu’on t’attache avec des ceintures ? demande Chaumiette. Si tu allais tomber…

— Pas de danger.

Il descend en s’aidant des aspérités des parois, se retenant aux branches. Il tient les deux nids. Il nous les passe l’un après l’autre.

— Y en a-t-il, hein ? … Ah ! j’entends encore piauler en dessous…

Il se penche pendant que, agenouillés au bord du puits, Chaumiette et moi, nous cherchons à voir.

— Ah ! deux autres nids ! Tout…

Nous poussons un cri. La touffe d’herbe à laquelle se cramponnait Lucas s’est arrachée et il est tombé dans le gouffre, la tête la première, au milieu d’un grand bruit de branches cassées et de feuillages froissés, accompagné dans sa chute par une avalanche de sable et de pierres qu’on entend seules rouler encore.