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partout ; elle y passe ses heures de liberté, elle y dépense ses demi-journées du dimanche, jusqu’à l’heure de la messe ― qu’elle passe au bleu.

Si Catherine a une haine et un dégoût : les poireaux, elle a une admiration et un amour : son frère. Il existe en chair et en os, ce frère, aux cuirassiers ― au 8e de l’arme ― ; et, en effigie, tout le long des murs de la chambre de sa sœur. Il est là debout, assis, à pied, à cheval, en veste d’écurie, en grande tenue, tête nue, cuirassé et casqué. Chaque fois qu’elle touche ses gages, Catherine lui en envoie les deux tiers et lui réclame une photographie. La dernière qu’elle a reçue est superbe : elle a vingt centimètres de haut, elle est peinte et la tête du cuirassier, un point de carmin aux joues et aux lèvres, a été délicatement collée par le photographe entre le casque et la cuirasse d’un cavalier acéphale, comme on en fabrique d’avance, à la grosse.

Catherine ne tarit pas d’éloges sur son frère.

― Vous auriez dû vous engager dans son régiment, fait mon père. Vous avez la taille, je crois ?