Page:Darien, Bas les coeurs, Albert Savine éditeur, 1889.djvu/165

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d’herbe qui poussent entre les pavés. Un grand bruit de galopade, en haut de la rue Duplessis, me fait lever la tête.


― Oh !

Je m’aplatis le long d’un mur, plus mort que vif. Des cavaliers, des cavaliers comme je n’en ai jamais vu, passent devant moi au grand galop. C’est terrible ! Ils me font l’effet de géants et leurs chevaux, dont les fers luisants frappent la pierre en faisant jaillir des étincelles, me semblent énormes, eux aussi. Oh ! que j’ai peur !

Ils sont passés, ils sont déjà loin, que je ne puis bouger de ma place. Je tourne la tête, seulement, et je les aperçois, tout là-bas, galopant toujours. Brusquement, devant la gare, ils s’arrêtent. Comment ! ils ne sont que quatre ! J’aurais juré qu’ils étaient cent. On dirait des lanciers, mais des lanciers tout noirs. Ils ont un gros pistolet au poing et, attachée au bras droit, une longue lance avec une banderole noire et blanche… Mais je n’ai pas le temps d’en voir plus long ; ils reprennent le galop et je ne distingue plus que l’étincellement des sabres et des fers, les couleurs des bande-