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LXXI
INTRODUCTION.

prochés du point en litige, nos patrons, mieux informés, ont pu donner une décision plus juste.

Et ceci fait connaître quel degré de confiance on doit accorder aux assertions téméraires d’Engelhardt et de Baumgarten. Depuis un siècle, depuis les prolégomènes de F. A. Wolf sur Homère, l’histoire des temps antiques est devenue pour beaucoup d’Allemands un ténébreux champ de bataille, où ces spadassins de la critique s’essaient à réduire des réalités longtemps incontestées à une valeur purement nominale. Car, après leurs exploits, déjà bon nombre de personnages se trouvent relégués au rang des mythes, et n’apparaissent plus dans le désert du passé que comme des ombres, des manières d’ombres. Ajoutez à cela qu’ils tiennent essentiellement à faire de la philosophie de l’histoire, comme ils disent, et surtout à la faire d’un point de vue anti-catholique. Leurs affirmations, en critique comme en toute autre science, rentrent dans ce cadre inflexible, véritable lit de Procuste, où les personnes et les choses viendront s’ajuster, malgré qu’elles en aient. N’opposez à ces spéculateurs ni doctrine avérée, ni événements révolus : leur siége est fait, comme disait quelqu’un. Or, faux et désastreux dans sa généralité, ce système est sans fondement et sans vérité dans l’espèce et en ce qui concerne saint Denys. Car il nous est permis de nier, comme on s’est permis d’affirmer, que notre auteur ait copié les néo-platoniciens. S’il s’agit de la forme, l’air de parenté qu’affectent les œuvres de l’Aréopagite avec celles de l’école d’Alexandrie, considéré seul, ne prouve la priorité ni des unes, ni des autres, et ne peut motiver aucune affirmation sur ce point. S’il s’agit du fond, à qui fera-t-on croire que le dogme catholique de la Trinité ne soit dans saint Denys qu’une épuration de la triade néo-platonicienne ? ou que l’union de l’homme sanctifié avec Dieu, telle que Jésus-Christ l’avait sollicitée par son ardente prière, ut sint unum sicut et nos unum sumus[1], n’ait pu être admise, enseignée et décrite qu’a-

  1. Joan., 17, 22.