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XXXVIII
INTRODUCTION.


discute à fond sa décision, c’est un droit et un devoir ; mais quand un protestant parle, allons donc !

Pourtant on ne peut qu’être édifié de ce que nous transmet saint Denys touchant les rits pratiqués envers les défunts. Ce qui déplaît au protestantisme, c’est l’onction des cadavres, comme il vient de nous le dire ; c’est surtout la prière pour les morts, comme il n’a pas voulu l’avouer. Or il n’y a rien en cela qui ne se soit fait, ou même qui ne se fasse encore.

Les Juifs avaient coutume d’oindre et d’embaumer les morts, en quelques circonstances du moins[1] ; qu’y a-t-il d’étonnant que les premiers chrétiens, Israélites convertis, aient gardé cette religieuse pratique ? et que les Gentils l’aient adoptée en embrassant la foi ? Marie-Magdeleine est louée de l’attention qu’elle eut d’acheter des parfums et de venir embaumer le corps de Jésus, dont elle ignorait la résurrection[2] : pourquoi les pieux fidèles n’auraient-ils pas continué envers les membres ce que la sainte femme avait fait pour le chef ? Pourquoi n’aurait-on pas commis au prêtre, ou même à l’évêque, le soin mystérieux de verser l’huile sainte sur les morts, d’autant plus, comme l’observe saint Denys, que cette onction signifiait que le défunt était glorieusement sorti des combats auxquels on l’avait voué catéchumène[3] ?

Quant à la prière pour les morts, nier qu’elle ait été en usage dès l’origine du christianisme, c’est abolir la valeur de tout témoignage et introduire le scepticisme le plus complet dans l’histoire. Tous les controversistes catholiques depuis trois siècles ont tellement mis ce fait en lumière, qu’il est inutile de s’y arrêter ici. Nous dirons seulement que Tertullien, saint Cyrille de Jérusalem, saint Chrysostome, saint Augustin, pensaient sur ce point comme les catholiques d’aujourd’hui, et comme les contemporains de saint Denys l’Aréopagite[4].

  1. Lamy, Introd. à l’Écrit. sainte, chap. 17. — Fleury, Mœurs des Israël., no 19.
  2. Marc., 16, 1 ; Luc, 24, 1. — Joann., 20, 1.
  3. De Eccl. hier., cap. 7, part. III, no 8.
  4. Tert., de Coron., cap. 3. — Cypr.,