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XXXI
INTRODUCTION.
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l’auteur du chant dans les églises[1] est une nouvelle preuve de sa haute antiquité ; car on voit, d’après ce passage, qu’en ce temps n’existait pas encore l’alternation des chœurs, qui cependant prit naissance à Antioche sous l’inspiration de saint Ignace, son contemporain, se répandit bientôt parmi les chrétientés de l’Asie occidentale, et fut universellement adoptée sous Constantin[2].

Si donc il en faut croire la parole de notre écrivain, il n’y a pas le moindre doute à conserver sur l’authenticité des œuvres que nous examinons. Si, au contraire, on veut les traiter comme apocryphes, il faut alors opposer des raisons graves, irréfutables à des assertions multiples et positives. Voyons ce qui nous peut être objecté.

L’auteur, dit-on, se trahit manifestement, lorsqu’il invoque une tradition ancienne, ἀρχαία παράδοσις (archaia paradosis)[3], et l’autorité de saint Ignace[4] ; lorsqu’en parlant des morts[5], il décrit des rites qu’on n’a jamais pratiqués dans l’Église ; lorsqu’ailleurs[6] il cite une foule de cérémonies auxquelles il n’est pas croyable qu’on se soit exercé dès le temps des apôtres, et qu’enfin il raconte la consécration des moines, qui n’existèrent que longtemps après lui[7].

Mais, 1o que saint Denys ait pu citer des traditions, et que ce mot ne suppose pas nécessairement une suite de générations par lesquelles nous serait arrivée la vérité, c’est ce qu’on doit conclure d’un passage connu de saint Paul, qui, bien qu’antérieur à saint Denys, accuse pourtant l’existence des traditions[8]. Assurément il ne faut pas attendre que les protestants applaudissent à notre déduction : chacun sait pourquoi.

Or, cette tradition que saint Denys a trouvée sur son passage, pouvait-il la nommer ancienne, ἀρχαία (archaia). D’abord ramené à son radical, ce mot signifierait premier, primitif, originel. Or, quand un terme est susceptible d’une

  1. De Eccles. hierarch., cap. 3.
  2. Gilb. Genebr. chronol., sæc. 1o.
  3. De Eccles. hierarch., cap. 7.
  4. De Divin. nom., cap. 4.
  5. Ibidem.
  6. Passim.
  7. De Eccl. hierarch., cap. 6.
  8. II Thessal., 2, 14.