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INTRODUCTION.

facultés de connaître et d’aimer désormais déifiées. Tel est le prix des longs efforts de la vertu ; telle est l’union qu’elle détermine entre le créateur et la créature[1].

Cette esquisse montre la ressemblance exacte des doctrines mystiques du moyen âge avec celles de saint Denys, et conséquemment l’action exercée par le docteur athénien sur cette branche des études théologiques. Il a été prouvé d’ailleurs que la scholastique lui emprunta le plan général de ses travaux et la solution scientifique des questions qu’elle examinait. Ainsi se trouve constatée et décrite la part d’influence qui revient à saint Denys sur cette période de cinq siècles durant laquelle se constitua l’esprit des peuples européens, et la science moderne jeta ses fondements.

Il nous reste un mot à dire sur ce que devinrent le nom et les doctrines de l’Aréopagite, dans les trois cents ans qui viennent de s’écouler.

D’abord, et avant toute autre indication, il est certain que le nom de saint Denys fut en honneur et sa pensée accueillie, au moins chez quelques hommes, durant tout le cours du seizième siècle. En effet, la France, l’Italie et l’Allemagne publièrent à l’envi les œuvres du saint docteur ; même il s’en fit rapidement de nombreuses éditions dans les mêmes villes, à Paris (1515, 1544, 1562, 1565), à Bâle (1539, 1576), à Cologne (1546, 1577), à Venise (1538, 1546, 1558), à Strasbourg (1498, 1546, 1557). Les esprits les plus distingués de l’époque étudiaient et admiraient de si brillants écrits. Tels furent Marsile Ficin, les Pic de la Mirandole, Joachim Périon, Lefebvre d’Étaples, Lanssel, Corderius, Ambroise le camaldule, qui commentèrent ou traduisirent saint Denys et firent passer ses doctrines dans leurs propres ouvrages.

Outre ce mouvement moitié matériel, moitié intellec-

  1. Bernard., in Cantic ; Richard. Victor., de Gradibus charit. ; de quatuor Grad. violente charitæ ; Bonavent., ubi suprà ; item, Incendium amoris ; Gerson, de Mysticâ Theol. ; Suson, ubi suprà, Joan. Rusbr., de septem Gradibus amoris ; et potissimùm æde Nuptiis spiritualibus.