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CXVII
INTRODUCTION.

dant qu’un être d’emprunt ne méritent pas qu’on leur donne le nom d’être, qui appartient excellemment à Dieu, source profonde, abîme immense, océan infini de l’être. Il est bon d’observer toutefois que ces locutions, qui ne manquent certes pas de justesse et d’élévation dans le langage philosophique, et avec les commentaires que leur donne saint Denys, ne doivent pas être employées témérairement et sans explication préalable dans le discours ordinaire. Au reste, chacun sait fort bien qu’une proposition, outre le sens grammatical qu’elle a nécessairement, emprunte aux affirmations parmi lesquelles on la rencontre, un sens accidentel, et une valeur logique, et que c’est par ce dernier endroit qu’elle doit être définitivement appréciée : c’est un x qui reçoit sa signification spéciale, quand on applique la formule aux données du problème. Aussi le sens commun innocente et même approuve avec raison en tel livre la parole qu’il flétrit et condamne avec non moins de raison dans tel autre livre.

III. De l’origine du mal.

Le mal existe : c’est ce dont chacun se plaint. Toute vie, en effet, semble n’être qu’un inconsolable gémissement et un douloureux effort contre des puissances ennemies. Les lumières de nos esprits ne sont pas sans ténèbres ; la raison connaît les angoisses du doute ; la volonté a ses chancellements et ses hésitations, et la conscience, ses remords. Nulle félicité n’est absolument pure, et le soleil de nos plus beaux jours se prend à verser tout à coup sur nos joies je ne sais quelles teintes malheureuses et sombres. L’univers matériel apparaît lui-même comme le théâtre d’une hostilité flagrante, et l’on dirait que l’ordre général et la vie universelle fussent attachés à la persistance de ces rivalités effroyables. L’air et les flots sont pleins de tempêtes ; les profondeurs de la terre recèlent la destruction et la mort qu’elles vomissent de temps en temps parmi d’horribles feux ; les saisons sont armées de ri-