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RÉRI

là, sur son trône de fleurs, parée de ses robes élégantes ; mais son front, ses joues et sa gorge étaient couverts de plaques hideuses ; ses mains, ses pieds, étaient tuméfiés, tordus, portaient tous les signes de la lèpre ! Ils furent d’abord cloués sur place, puis leur première pensée fut de courir vers leur enfant. À leur brusque entrée dans sa chambre, Réri s’éveilla en sursaut : « Qu’y a-t-il ? qu’y a-t-il ? » dit-elle. Mais sa mère l’ayant regardée, saisit d’un geste la petite glace pendue au mur et la lui plaça sous les yeux : « Vois ! vois ! » cria-t-elle presque folle. Et Réri vit dans le miroir sa figure nette et saine, ses joues claires et son cou poli. Elle regarda ses mains, et tous les nœuds difformes, et toutes les dégoûtantes écailles, en avaient disparu. Elle sauta hors du lit, marcha, et tous ses membres avaient recouvré leur souplesse. Alors, ivre de joie, elle courut au dehors, se dressa devant toute la foule, et, reconnaissant les amies qui l’avaient souvent visitée : « Yuranna, Atahu ! Yuranna, Tiari ! Voyez, je suis comme vous, je peux jouer avec vous toutes ! »

Voici un fait, mon cher, plus absurde qu’une fable, et dont tout Papeete a été témoin. Tu comprends qu’un sceptique comme moi a enquêté, creusé tous les doutes ; mais l’évidence est absolue. Quand je suis arrivé ici, l’événement était dans toutes les bouches, avait eu la primeur du journal de l’île,