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CONTES DE NOËL

désormais, je n’aime plus ces poupées. » Et elle courut, en sanglotant s’enfermer dans sa chambre.

Rien ne put la tirer de ce désespoir. Réri avait perdu l’illusion bienfaisante et retombait dans toute sa misère. Ses parents aux abois ne savaient plus où se tourner. Une idée les frappa enfin comme une suprême ressource et, bien qu’ils fussent chrétiens, réveilla leurs superstitions natives. Tous les maux, toutes les infortunes, étaient causés par les esprits, les tupapahous malfaisants qui volent autour des toits par les nuits d’orage, qui sèment dans l’air les mauvais sorts, et que seuls les sorciers ont le pouvoir de conjurer. Si la vieille Tétua venait à leur secours, elle chasserait les maléfices, rendrait la santé à leur fille : car elle était connue pour les prodiges qu’elle opérait. Elle demeurait à Mataiea, dans un autre district de l’île : on lui envoya des offrandes de grains et d’étoffes pour qu’elle consentît à venir et entreprît la tâche ardue. Elle arriva un soir, s’accroupit devant l’âtre, et se fit raconter toute l’histoire de Réri. Après quoi, levant des mains de squelette : « Les esprits ont tout fait », s’exclama-t-elle, « ils sont puissants : il faudra toute la force des plantes et des paroles. » Elle passa le lendemain dans les bois, sur la grève, et rentra portant un faisceau d’herbes et de racines qu’elle