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RÉRI

mer, les feis, les fruits de l’arbre à pain, où dans les salles de thé commençaient les himénés[1] et les danses. Il m’expliquait le charme de cette terre unique, sa liberté des esclavages dont nous nous lions, son voisinage aux sources même de la nature. Puis, comme poursuivant une pensée : « Tu croirais à peine, me dit-il, l’histoire de cette petite : je te la dirai quelque soir. Je loge chez ses parents ; c’est là que nous serons ensemble. »

— « Et à ce choix, repris-je, taquin, la petite n’est pas étrangère ? » — « Peut-être, répliqua-t-il, mais ce n’est pas comme tu l’entends. »

Et le soir, quand le grand silence fut tombé sur l’île endormie, à l’abri d’un palmier transpercé d’un rayon de lune, sous une brise qu’on eût dit soufflée du cœur des calices odorants, George Hamel me conta l’histoire de Réri.

« Cette enfant, me dit-il, était lépreuse jusqu’à l’année dernière. Lépreuse, mon cher, en un stage avancé ; rongée par tout le corps de dartres dévorantes ; ce visage, que tu vois maintenant si clair, et si gentil, n’est-ce pas, déjà envahi d’une gangue hideuse. Je te dis cela tout d’abord, pour que tu saches qu’il y a encore ici-bas des prodiges, pourvu qu’on les cherche assez loin.

  1. Chansons.