Page:Dantin - Contes de Noel, 1936.djvu/44

Cette page a été validée par deux contributeurs.
46
CONTES DE NOËL

Les ours n’achevaient plus de grogner ; l’homme au fouet se tourne de leur bord : « Taisez vos gueules, sales bêtes, qu’il leur crie, ou je vous hache le cuir en courroies de bottes. » Puis, en parlant à la diablesse : « Allons, guenon, fais ta simagrée. » — « T’as pas à me bourasser, qu’elle réplique, monstre d’aigrefin, je sais ce que j’ai à faire. » Elle s’approche du petit démon, lui fait une révérence, et elle était parée à se mettre à genoux quand elle aperçoit Létourneau à l’entrée de la cave, qu’était blême comme un drap, que les dents lui claquaient dans la bouche. Tout de suite, les yeux de la gueuse flambent comme des tisons, puis elle se met à rire et à faire des manières. « Quel joli homme ! » qu’elle dit : « Viens donc que je t’embrasse, mon mignon chéri : tu ne sais pas comme je te trouve beau ! Tiens, mais c’est Florent Létourneau, du coin de la montée de Saint-Jovite ! Ah bien ! je te connais : tu m’as vue plus d’une fois sans le savoir. Comme t’es gentil de me rendre visite ! Alma Latour t’aime bien, je sais tout ça, mais moi, je t’aime dix mille fois plus, et je te veux pour mon petit mari ! Tu ne viens pas, mon cœur ? Bien, je vas aller t’embrasser moi-même. »

Elle ne fait ni une ni deux, elle enjambe par dessus le marmot et elle s’en allait dret sur lui, monsieur, quand son partenaire l’arrête net d’un coup de fouet à travers les