Page:Dantin - Contes de Noel, 1936.djvu/102

Cette page a été validée par deux contributeurs.
106
CONTES DE NOËL

— Ben, ma belle, de grand cœur : v’là une piastre pour ta crèche. C’est pas trop tôt qu’on la démanche, la vieille bâtisse. Mais je te demande une faveur : c’est qu’ça soit moi qui t’mène à la messe de minuit.

Caroline hésita un peu, puis reprit :

— Tu sais, Fanfan Poupart et le p’tit Luc à Bénoni m’ont déjà invitée ; mais j’peux pas dire que j’ai promis. Entendu, j’irai avec toi.

François plaça le billet vert dans la main de la fille comme il eût fait les arrhes d’un contrat. Puis, toujours à son idée fixe :

— Dis donc, ajouta-t-il, câlin, si on allait, après la messe, faire une visite au presbytère ?

— Ça, on n’en parle pas, François, soit dit sans t’faire de peine. Tiens, va donc voir derrière la grange : j’entends la petite génisse qui cornaille dans le tombereau.

Maintenant l’hiver s’abattait sur toute la campagne. Des neiges hâtives avaient brûlé les dernières végétations, et forcé hommes et bêtes à se calfeutrer à l’abri. Dans les veillées plus longues les jaseries s’éternisaient, tandis que les poêles dévoraient les bûches et dégageaient l’odeur friande des beignes et des tourtières. On prévoyait cette année un