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si doux à entendre qu’il paraît impossible que ses œuvres soient autrement que douces, car les noms suivent les choses auxquelles ils sont appliqués, comme il est écrit : nomina sunt complementa rerum. La quatrième était celle-ci : la femme à qui l’Amour t’attache si étroitement n’est pas comme les autres femmes dont le cœur se meut si légèrement.

Et chacune de ces pensées me faisait la guerre au point que je ressemblais à celui qui ne sait pas quel chemin suivre, qui voudrait bien marcher, mais qui ne sait pas où il va. Et si je songeais à chercher un chemin battu, c’est-à-dire celui que prendraient les autres, ce chemin se trouvait tout à fait contraire à mes pensées, qui étaient de faire appel à la pitié, et de me remettre entre ses bras. C’est dans cet état que je fis le sonnet suivant :

Toutes mes pensées parlent d’amour[1],
Et le font de manières si diverses
Que l’une me fait vouloir m’y soumettre
Et une autre me dit que c’est une folie[2].

  1. Tutti li miei pensier parlan d’amore
  2. Il y a ici deux versions différentes : Fraticelli lit folle, folie, version que j’ai suivie. Giuliani lit forte, ce qui signifierait que cette pensée est plus forte.