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apparence ; dans la deuxième, je dis ce qu’il m’a dit, quoique pas complètement, de peur de découvrir mon secret. Dans la troisième, je dis comment il disparut. La seconde partie commence à : quand il me vit… la troisième à : alors je pris…


On peut remarquer que ceci ne nous est pas donné précisément comme une vision ou une hallucination, mais comme le travail d’une imagination hantée par des pensées obstinées. Ce ne serait donc que la traduction de ces pensées sous une forme figurative.

Lorsque le Poète évoque la présence et l’inspiration de l’Amour, ce n’est sans doute qu’une manière d’exprimer ce qui se passait au dedans de lui-même. Lorsque l’Amour lui apparaît brillant et joyeux, c’est que son âme était allègre et ouverte à de douces perspectives. S’il lui apparaît ici mal vêtu, hésitant et inquiet, c’est que son âme à lui était inquiète et hésitante. Et ce qui la rendait ainsi, c’était la préoccupation de sa propre dissimulation, de la défense de son amour (comme il l’appelait) qu’il avait perdue, et qu’il songeait déjà à remplacer, avec un empressement où l’on ne saurait nier qu’il y n’eût quelque chose de suspect ; c’était enfin un certain malaise,