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L’ENFER

démons fut indignée : celui qui avait accepté le premier la proposition se mit en mouvement avant les autres, et cria : « Tu es atteint. » Mais ce fut en vain : ses ailes lui refusèrent la même vitesse que la crainte avait donnée au coupable, en le précipitant au fond du lac, et le démon fut arrêté à sa surface. C’est ainsi que le canard, quand il aperçoit le faucon, s’enfonce sous les eaux, et que le faucon remonte dans les airs, fatigué et honteux de n’avoir pu saisir sa proie. Calcabrina, irrité contre Alichino, partît d’un vol rapide, désirant ardemment que son compagnon n’atteignît pas l’ombre coupable, pour avoir l’occasion de le déchirer lui-même.

Le prévaricateur ayant tout à fait disparu, alors Calcabrina porta ses griffes sur son compagnon, et il lui livra un terrible combat : l’autre ne le refusa pas, et, comme un épervier redoutable, opposait à son ennemi des serres menaçantes. Bientôt le choc impétueux des démons les fit tomber tous deux dans le lac bouillant ; la chaleur les sépara au même instant ; mais ils ne purent se relever, malgré leurs efforts, tant la poix visqueuse avait englué leurs ailes. Barbariccia, affligé de cette querelle, envoya quatre des siens de l’autre côté de la vallée : armés de leurs crocs, ils descendirent sur le bord, et les présentèrent aux démons emprisonnés qui étaient déjà presque consumés par la poix.

Pour nous, en ce moment, nous laissâmes ces misérables souillés par le bitume enflammé.