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INTRODUCTION.

sait un autre problème que se sont également proposé toutes les philosophies ; car, en ce qui touche l’univers, il n’en est point de plus général ni de plus fondamental ; et lorsqu’on vient à y regarder attentivement, on est surpris de voir combien se ressemblent, au langage près, les solutions qu’on en a données.

Dans ce que la nature présente à notre vue on reconnaît d’abord deux choses essentiellement distinctes : un fond commun étendu, divisible, que la pensée peut séparer de toute détermination spécifique et différentielle ; des êtres déterminés, et différents les uns des autres par des qualités et des propriétés spécifiquement diverses. D’où la nécessité de conserver deux principes, qui, sous quelque nom qu’on les désigne, correspondent à ce que les Scolastiques, dont la doctrine est celle de Dante, appelaient matière[1] et forme. La matière homogène, inerte, recevait dans chaque sphère les vertus qui, transmises par les sphères supérieures, l’informaient, c’est-à-dire produisaient, en s’unissant à elle, les formes diverses ou les êtres divers que spécifient ces formes ; ou, comme on parlait encore, ces causes formelles de la configuration extérieure et de la nature intime de chaque être.

Chez les anciens, quelques sectes philosophiques avaient cherché à expliquer la variété dans l’univers, sans recourir à deux principes distincts. Elles n’ad-

  1. L’ulè des Grecs.