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INTRODUCTION.

et si vive que, dès l’enfance, lui avait inspirée cette jeune fille se transforma, et sembla depuis lors flotter, en quelque sorte, entre l’objet réel ravi à son amour terrestre, et un type idéal où se concentrait tout ce que le poëte concevait de plus haut dans ses contemplations religieuses et philosophiques. La femme devint symbole sans cesser d’être femme, et toujours, dans le ciel même, au sein du mystère qui l’enveloppe, elle apparaît sous ce double aspect.

L’ouvrage singulier où Dante peint si vivement les amères douleurs d’une perte irréparable et la transformation qu’elle opéra en lui, est en même temps une de ces œuvres où, en l’enveloppant de symboles familiers aux adeptes, et clairs pour eux seuls, les Gibelins, comme nous l’avons dit, cachaient le secret de leurs pensées et de leurs passions politiques. Il commence ainsi :

« Dans cette partie du livre de ma mémoire, avant laquelle il y aurait peu de choses à lire, se trouve une rubrique qui dit : Ici commence la vie nouvelle. Sous cette rubrique, je trouve beaucoup de choses écrites, et des paroles que j’ai l’intention de rassembler dans ce livre, sinon textuellement, au moins quant au sens[1]. »

Il raconte ensuite de quelle manière, lorsqu’il accomplissait sa neuvième année, lui apparut la glo-

  1. Traduction de M. Delécluse.