Page:Dante - La Divine Comédie, traduction Lamennais volume 1, Didier, 1863.djvu/359

Cette page a été validée par deux contributeurs.
349
CHANT DIX-HUITIÈME.

34. Déjà nous étions là où l’étroit sentier croise le second rempart, et forme une voûte d’une arche à l’autre.

35. Là nous ouïmes la gent qui gémit dans l’autre bolge [12], et s’ébroue, et se déchire de ses propres mains.

36. Les rives, par l’haleine qui d’au-dessous monte et s’y épaissit, étaient recouvertes d’une croûte moisie, qui rebute les yeux et le nez.

37. Si avant est le fond, que d’aucun lieu on ne le peut voir sans monter sur le haut de l’arche, où le rocher est le plus à pic.

38. Là nous vînmes, et de là, en bas dans la fosse, je vis des gens plongés dans une mare d’excréments qui des privés semblaient être tirés.

39. Et pendant que de l’œil je cherche dans cette fosse, j’en vis un dont la tête était si salie d’ordures, qu’on ne pouvait reconnaître s’il était laïque ou clerc.

40. Grondant, il me dit : « Pourquoi plus avidement me regardes-tu que les autres souillés ? » Et moi à lui : — Parce que, si bien m’en souviens-je,

41. Je t’ai déjà vu avec des cheveux secs, et tu es Alexis Interminei [13], de Lucques ; pour cela, je te regarde plus que les autres.

42. Et lui alors se frappant le crâne : « Ici bas m’ont plongé les flatteries dont ma langue jamais ne fut lasse. »