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INTRODUCTION.

sa patrie et de la corruption générale du monde. Ainsi se justifie ce que, plus tard, il disait de lui-même :


Jura Monarchiae, superos, Phlegetonta, dacusque
Lustrando, cecini, voluerunt fata quousque.


Cette question, agitée avec tant de chaleur au Moyen âge, durant la longue lutte des Pontifes et des Empereurs, est encore aujourd’hui la question principale pour la malheureuse Italie. L’empire n’existe plus ; les vents en ont dispersé la poussière ! Mais Rome a conservé son pouvoir temporel, incompatible avec l’unité et la liberté de la Péninsule ; et ce pouvoir, qui la mêle au mouvement du monde politique, réagit également, à des degrés divers, sur les destinées de tous les peuples catholiques, en faisant d’elle l’alliée naturelle des puissances dont le droit, supérieur au droit national, est radicalement absolu, dès lors, et supposé d’institution divine immédiate. Son autorité spirituelle qui, en lui soumettant la raison, la conscience, établit la servitude dans le fond même de l’âme, forme, ainsi que nous l’avons montré, un obstacle non moins invincible au progrès de l’humanité dans tous les ordres. Dante ne remonta point jusqu’à cette cause première des désordres dont il se plaignait ; pour la bien comprendre, il fallait un travail nouveau de la pensée et de nouvelles leçons de l’histoire. N’est-ce pas un sujet de méditation profonde que de voir, à six siècles