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INTRODUCTION.

« Que bientôt de votre conscience la grâce nettoie l’écume, de sorte qu’en elle descende limpide le fleuve de l’esprit !

« Dites-moi (ce me sera une faveur précieuse) si, parmi vous ici est une âme Latine : peut-être lui sera-t-il bon que je la connaisse. »

Une des ombres répond :

« O mon frère ! chacune d’elles est citoyenne d’une vraie cité ; mais tu veux dire qui dans l’Italie ait vécu pèlerine[1]. »

Si naturels sont ces derniers mots, que l’attention à peine s’y arrête ; et cependant l’on est, par eux, tout d’un coup transporté d’une vie dans une autre vie. De ces traits presque inaperçus résulte la vérité, d’où dépend l’effet général. Qui les cherche, ne les trouve jamais : le génie les inspire aux grands poëtes.

Le chant qui suit, presque entièrement historique et politique, montre avec quel soin Dante entrelace les deux sujets de son poëme. Une ombre, après avoir dépeint les vices divers des habitants du val d’Arno, annonce, en un langage mystérieusement vague, des désastres futurs, et à la corruption, à la bassesse des mœurs dégénérées, oppose le charme et la pureté des anciennes mœurs. La douleur qu’elle ressent de ce contraste l’empêche de continuer. « Va, dit-elle, Toscan ! car trop plus maintenant me délecte le pleurer

  1. Purgat., ch. XIII, terc. 29-32.