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INTRODUCTION.

rêve. Les violents mouvements de l’âme se sont apaisés. Les peines matérielles y ressemblent à celles de l’enfer, et l’impression en est toute différente. Elles éveillent une tendre pitié, au lieu de la terreur et d’une âpre angoisse. L’âme souffrante, non-seulement les accepte parce qu’elle en reconnaît la justice, mais elle les désire parce qu’elle sait qu’elle guérira par elles, et que, dans la douleur passagère, elle pressent une joie qui ne passera jamais. De là je ne sais quoi de tranquille, de calme, de mélancolique et de serein. Otez de la vie présente l’incertitude, le doute, la crainte, laissez-y seulement avec ses misères l’espérance qui les adoucit, et une pleine foi d’atteindre le but que l’espérance nous montre, ce sera le Purgatoire tel que Dante le peint. Et c’est qu’au fond le Purgatoire, l’Enfer, le Ciel, au degré où nous pouvons en avoir et l’idée et le sentiment, ne sont que les divers états de l’homme sur la terre, le monde où nous vivons, mélangé de vertus et de vices, de jouissances et de souffrances, de lumières et de ténèbres, et qu’en réalité l’autre monde n’en est que l’extension dans une sphère plus élevée et plus large. Séparez du bien et du mal l’absolu impossible, il ne reste que ces choses, héritage commun des êtres imparfaits et indéfiniment perfectibles. Notre enfer, notre purgatoire, notre ciel, c’est nous-mêmes, selon l’état de l’âme, duquel dépend radicalement celui du corps, et, si bas que soit le point