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INTRODUCTION.

germe, et en unissant les hommes disposés à se séparer ouvertement du désordre presque universel, en formant d’eux une société, il imprima une forte et salutaire impulsion à l’humanité. Cette organisation active, née d’une foi ardente, d’un secret et profond instinct de vie, fut une des choses qui, quelle que fût son incontestable grandeur, manquèrent au stoïcisme, resté à l’état de doctrine individuelle, et par là même socialement stérile.

Il est également vrai que les peuples sous la main desquels s’écroula l’empire, exempts de la mollesse romaine, avaient en eux une énergie, une plénitude de vie organique qui contrastaient au plus haut point avec l’affaissement, l’épuisement des races destinées à devenir leur conquête.

De quelque côté que se portassent les regards, ils n’apercevaient que des signes trop certains de décadence. Le pouvoir absolu d’un seul au milieu d’une servitude sans bornes ; l’amour effréné des jouissances ; l’accumulation des richesses en un centre unique, où elles corrompirent à la fois le gouvernement et le peuple ; l’appauvrissement des provinces en proie aux exactions des proconsuls et des agents du fisc, écrasées par l’impôt, dévorées par l’usure ; la corruption du luxe et celle de la misère ; le relâchement des liens de famille et des liens sociaux ; l’extinction de l’esprit militaire dans les populations énervées ; les armes de-