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INTRODUCTION.

« Pensez à ce que vous êtes ; point n’avez été faits pour vivre comme des brutes, mais pour rechercher la vertu et la connaissance.

« Par ces brèves paroles, j’excitai tellement mes compagnons à continuer leur route, qu’à peine ensuite aurais-je pu les retenir.

« La poupe tournée vers le levant, des rames nous fîmes des ailes pour follement voler, gagnant toujours à gauche.

« Déjà, la nuit, je voyais toutes les étoiles de l’autre pôle, et le nôtre si bas que point il ne s’élevait au-dessus de l’onde marine.

« Cinq fois la lune avait rallumé son flambeau, et autant de fois elle l’avait éteint depuis que nous étions entrés dans la haute mer,

« Quand nous apparut une montagne, obscure à cause de la distance, et qui me sembla plus élevée qu’aucune autre que j’eusse vue :

« Nous nous réjouîmes, et bientôt notre joie se changea en pleurs, de la nouvelle terre un tourbillon étant venu, qui par-devant frappa le vaisseau.

« Trois fois il le fit tournoyer avec toutes les eaux ; à la quatrième, il dressa la poupe en haut, et en bas il enfonça la proue, comme il plut à un autre,

« Jusqu’à ce que la mer se refermât sur nous. »

Pas un mot après ce dernier mot ; le chant finit soudain : on ne voit plus, on n’entend plus que le